

Ce matin-là… il y eut la chute d’un corps, celle du père dans la salle de bains devant l’épouse hébétée et une jeune fille qui, à la veille de prendre l’avion pour aller enseigner au loin, son rêve, prend les choses en mains, appelle les secours, veille sur le père. Le frère ne viendra pas ou alors beaucoup plus tard. Elle se sent responsable et renonce à son rêve…
Puis nous voyons Clara, douze ans plus tard, plutôt épanouie, qui vend de l’argent et de ce fait contribue au bonheur de celles et ceux qui viennent « acheter » cet argent pour vivre mieux. Tout va très bien. Trop ?
Il y a un autre matin, qui laisse Clara sans réaction dans un flot de larmes. Au départ, la voiture qui ne répond plus… L’image est forte, plus rien ne va rouler normalement dans la vie de Clara. Elle craque… Elle ne sait pas pourquoi… Thomas qui voulait vivre avec elle s’éloigne… Mais cela lui est égal… Quand on est dans cet état, le ressenti n’est plus le même, on est quasiment devenu une chose au gré du vent.
Gaëlle Josse décrit une dépression, une fine observation de la personne atteinte et des réactions de l’entourage. « Secoue-toi, arrange-toi, tu ne vas pas rester comme ça ». Des remarques inutiles face à ce séisme qui met à terre.
Comment comprendre Clara ? L’aider ? Toi, de toute façon, il faut que tu donnes toujours tout. C’est Thomas qui avait dit cela…
Peu à peu, du fond de sa nuit et de son errance, les faits enfouis remontent. Ce n’est pas l’un d’eux qui est à l’origine de son état. C’est l’accumulation et sans doute le besoin de Clara d’être en première ligne, non pour elle, mais pour les autres. Une sorte de fuite en avant… Alors qu’il eût fallu s’arrêter, souffler, penser à soi. Avec Thomas, pourtant, elle n’avait pas su tout donner. C’est à son travail qu’elle avait offert le meilleur.
Le chemin de la reconquête de soi est long. Gaëlle Josse confie avoir voulu écrire un livre qui soit comme une main posée sur l’épaule. C’est vraiment ce que l’on ressent de chapitre en chapitre, court, parfois avec une citation poétique, (l’auteur l’est), une comptine, odeur d’enfance qui est une invitation à regarder par la fenêtre pour y cueillir ce qui s’offrir et reconstruire. C’est toujours possible.
Le ton est juste, ce livre est une réussite, une musique pour la vie.